7 octobre 2021
No fashion on a dead planet

Louis Vuitton présentait hier sa nouvelle collection en clôture de la fashion week parisienne. Des militants d’Extinction Rebellion, des Amis de la Terre et de Youth for Climate ont réussi à s’introduire et à diffuser des messages forts pendant le déflié. Sur le podium, les militant·es ont brandit plusieurs messages marquants : « Climate is a Fashion victim », « No Fashion on a dead planet », « LVMH Macron : complices dans l’inaction ». À l’extérieur, les activistes ont organisé leur propre événement : des mannequins portant des masques à gaz ont défilé dans une fumée noire, symbolisant les méga-incendies qui se multiplient du fait du changement climatique, accompagnés du message : « Notre planète brûle : la mode regarde ailleurs ».

Sur les réseaux sociaux, de nombreux commentaires s’indignent et prennent la défense de la haute-couture. Leurs arguments sont les suivants: la mode parisienne emploie de nombreuses petites mains qualifiées, elle maintient en activité de nombreux savoir-faire voués à l’oubli par le modernisme, elle est éminemment Made in France… Voici selon nous pourquoi Louis Vuitton est une bonne cible et pourquoi, comme le défendent ces organisations, il est temps de changer les choses.

L’industrie de la mode représente jusqu’à 8,5% des émissions de gaz à effet de serre mondiales

Le textile utilise 11% des pesticides consommés dans le monde et provoque 20% de la pollution des cours d’eau. 42 vêtements par habitant ont été commercialisés en France en 2019 pour un bilan plus de 30 millions de tonnes de CO2 importées en France chaque année. La fast-fashion, principale responsable de cette pollution, est désormais et à raison la cible privilégiée des lanceurs d’alertes et des organisations de défense de l’environnement. Mais le luxe, tête de fil de la production intérieure brute du territoire est plutôt épargné par la presse.

Le luxe, locomotive de consommation

Pourtant, sans le luxe, point de fast-fashion. Autant les profits de ces grands groupes n’irriguent pas les couches inférieures de la population, autant les valeurs superficielles et pécuniaires mises en avant par le luxe infusent et modifient notre rapport au monde. Lorsqu’un influenceur met en avant un produit inaccessible à la majorité de ses millions d’abonnés — ne serait-ce que par son prix, il impose en substance à ses followers de se replier sur des produits de meilleur marché. Loin d’être antagonistes, luxe et fast-fashion font système. Le luxe promet un style de vie exclusif, à la consommation débridée, sans contrainte financière tandis que la fast-fashion joue la voiture balais en proposant des offres de repli financièrement accessibles par le plus grand nombre. Vers la destruction inexorable des paysages et de ses habitants, ils avancent ensemble au sein d’un même train, l’un étant la tête, l’autre la queue.

La fortune de Bernard Arnault a progressé de 57% par rapport à juin 2020.

Autrefois « mode de vie caractérisé par de grandes dépenses pour faire montre d’élégance et de raffinement » (Crespin, 1607), le luxe n’est aujourd’hui qu’étalage d’indécence dans un monde qui s’effondre. Emblématique du système capitaliste, il impose la sur-consommation comme mode de vie en érigeant la tendance et l’exclusivité comme valeur ultime. Avec leurs marges exorbitantes, les aspects culturels et qualitatifs des produits du luxe sont désormais sacrifiés au profit du bénéfice social, ce sentiment d’appartenance à une classe de privilégiés, loin des problèmes du monde. D’ailleurs alors que le monde se relève doucement de la crise du Covid et qu’une crise financière d’ampleur s’annonce, la fortune du patron du premier groupe de luxe, LVMH, dont fait partie Louis Vuitton, a bondit de 57% pendant cette période difficile pour tout le monde… ou presque…

Sources et compléments:
Communiqué « Les Amis de la Terre »
CNRTL Éthymologie « Luxe »
Libération / Covid-19 : pendant la crise, les milliardaires français se frottent les mains
Europe 1 / Les chiffres du gaspillage textile